 Récit
de la «découverte» du SNAFU Special "Jai vu
ce Dakota pour la première fois en arrivant à Sarajevo avec ma compagnie
en juillet 1994. Je commandais alors la 3ème compagnie du 9ème régiment
de chasseurs parachutistes, héritier du 9ème RI, les fameuses bandes
de Normandie dont la devise était « Normandie en avant ! »... Ayant
troqués pour 6 mois nos bérêts rouges contre des casques bleus,
nous avions une mission de protection des populations et dinterposition
entre serbes et bosniaques musulmans, dans la région de laéroport
de la ville. Javais pour ma part la responsabilité dune vaste
zone qui comprenait notamment le petit village de Rajlovac, où se trouvait
un ancien aérodrome militaire yougoslave. Ce village était coupé
en deux par la ligne de front. Une de mes sections (30 hommes) était installée
en poste dans cet aérodrome, au milieu dune unité de miliciens
serbes, face aux positions bosniaques. Dès ma première reconnaissance
des lieux, stationné parmi de vieux appareils soviétiques le vieux
Dak mavait sauté aux yeux, bien quil ne fut pas demblée
au cur de mes préoccupations opérationnelles ! Javais
néanmoins pris le soin de lobserver de près, sans entrer à
lintérieur de peur dattirer les tirs bosniaques sur moi : la
protection offerte par nos casques bleus était souvent précaire... Le
malheureux appareil était une cible de choix pour les miliciens musulmans
qui devaient manifestement régler leurs armes sur sa vénérable
carcasse, parfaitement visible depuis la colline qui dominait laérodrome.
Je me fis la promesse de faire rapidement le nécessaire pour visiter lavion
de lintérieur. On voyait en effet quil avait eu une autre vie,
américaine probablement, comme en témoignait en particulier lemplacement
encore bien visible des antennes de réception du radar Rebecca. Quelques
semaines plus tard, à loccasion dune reconnaissance menée
sur les positions bosniaques face à laérodrome de Rajlovac,
je négociai un cessez le feu local pour aller visiter lavion, arguant
dun impératif tactique...Laprès midi même je me
rendais sur les lieux, prévenant les Serbes de mon intention. Javais
emmené avec moi le sergent Lesavre, un de mes sous-officiers armé
pour loccasion de quelques outils. Je souhaitai trouver la plaque didentification
de lappareil afin de mener les recherches permettant de retracer son histoire.
Nous approchâmes prudemment du Dak, espérant que les miliciens aperçus
au briefing du matin se rappelleraient de leur engagement... Sans résistance,
la porte cargo de lavion souvrit et nous nous engouffrâmes à
lintérieur. Il me fallut peu de temps pour comprendre quavant
dêtre yougoslave, lavion avait effectivement servi sous les
couleurs de lUS army air force mais aussi de larmée de lair
française. Nombre de ces équipements et instruments dorigine
en témoignaient. Le poste de pilotage était intact, hormis quelques
instruments cassés et endommagés. En revanche, plus aucune trace
dune utilisation de lappareil à des fins de largage de parachutistes,
peu de choses subsistant dans la soute. Jai rapidement trouvé
la plaque didentité dans le couloir, derrière le pilote. A/C
C-47- B. Serial N°15073
étaient les seules mais précieuses
indications quelle voulait bien livrer. Bien assez pour que lavion
révèle ses secrets et un passé que lon pouvait imaginer
riche ! En ressortant de lavion, nous avons fait quelques photos, sous
un ciel chargé, dans cet environnement triste et hostile. 6 mois plus
tard, de retour en France, jai contacté par courrier Yves Tarriel,
bien connu pour ses affinités avec les vieux Dak... Par retour du courrier
il me livra les premières clefs dune histoire dont je nimaginai
pas encore quelle serait celle de SNAFU Special..." 
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